17-07-2021
Ecrins
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D
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  Impressionné par la résistance au venin présentée par Julien plus tôt durant le camp, je juge cette qualité être un avantage considérable en alpinisme, et accepte donc avec plaisir sa proposition pour le week-end. Fort désappointés par la météo pour le moins variable du milieu de semaine à la Bérarde, nous étions en effet redescendus sur Lyon avec la dernière benne. Et pour agrémenter notre remontée dans le massif, et occuper un vendredi après-midi désœuvré, le choix du moyen de transport s'est porté sur la mobilité douce.

  C'est donc peu de temps après avoir englouti une assiette de spaghettis que je rejoins mon compère du week-end sur le quai de la gare, pour un combiné train-car-car, rompant agréablement avec le train-train quotidien. Nous sommes déposés à Champhorent passé 17h, et montons jusqu'au lac des Fétoules, surpris d'y être seuls au regard de la météo clémente annoncée pour le lendemain. Pour l'instant en revanche, quelques nuages chargés rôdent encore, semant le doute pour notre bivouac. Ce ne seront que quelques gouttelettes qui nous rafraîchiront au coucher du soleil. Cependant, dans la nuit noire et obscure, un bruit attire mon attention. J'extirpe ma tête de mon assemblage sac à viande / duvet / bivy, et aperçois Julien, courant en chaussettes dans les herbes marécageuses alentour, éclairant de sa frontale sa proie qui suit un parcours erratique : "Pourriture de renard, rends-moi ma quiche !". Probablement décontenancé par la ténacité de son poursuivant, le renard lâche son butin et mon camarade retourne finir sa nuit.

  Ces velléités cleptomanes nocturnes ne décalent pas pour autant l'heure du réveil, et c'est à 4h30 que nous nous mettons en marche le long du sentier, puis entre des vires et enfin en remontant un pierrier, pour attaquer à 6h15 la pointe du Faune, et ses deux longueurs initiales dans le 5. La première est en totale renfougne dans le dièdre, et la seconde présente un pas en dalle bien protégé par deux pitons aux bons endroits. Julien s'y engage en tête, et je ne tarde pas à le rejoindre, pour continuer corde tendue. Orienté ouest, et ayant passé la nuit dans les nuages, le rocher est humide, et nous offre quelques zipettes peu agréables. L'itinéraire est donné en 6-7h, et quand nous émergeons au sommet de la pointe du Faune à 9h30, je me demande si nous ne sommes pas en train d'exploser l'horaire. Pour autant, progressant à un bon rythme, nous sommes confiants et poursuivons sur le rappel, qui nous mènera au pied de la pointe Barbier qui, si elle est peu engageante de face, révèle une faiblesse via une rampe aisée à parcourir. Le fil de l'arête se poursuit, bien grimpant mais jamais difficile, pour nous aiguiller jusqu'au sommet de ladite pointe, auquel nous parvenons pour 11h30. Enfin, du soleil, promesse de moral grimpant, lui aussi, et surtout de rocher sec. Rappelant l'importance de la crème solaire, je profite des quelques minutes offertes par ce prétexte pour engloutir mon morceau de pain et de tome. C'est une courte désescalade enchaînée avec une traversée au pied des Ciseaux puis du Carquois qui nous mèneront sous l'antécime, que nous gagnerons aisément par des dalles en II, avant de poursuivre sur l'arête jusqu'au sommet. Des 3 autres binômes derrière nous, un seul nous rejoindra sur la fin, pour partager un panorama grandiose sur les Ecrins.

  S'ensuit la redescente via la normale et son glacier, sans trop brasser, puis une armée de gros cailloux s'évertue à fracasser mes semelles jusqu'à notre retour au point de bivouac peu avant 15h. Et là, heureuse surprise, nous tombons nez à nez avec quatre camarades Gaulois, venus faire l'arête des papillons le lendemain. Après quelques bavardages, Julien tente de retrouver son adversaire de la nuit pour lui présenter son copain le piolet. En vain. Il nous faut alors rejoindre Champhorent pour 17h46, heure du bus. Mais à force de traîner puisqu'on est en avance, et bien figurez-vous qu'on finit par ne plus l'être. On passe la seconde et on finit tout de même par attraper notre moyen de retour. S'ensuit alors une autre aventure impliquant planification de correspondance et commande de tacos, qui nous confirme dans notre efficacité en tant que binôme. C'est donc repus mais pas encore reposés que nous nous quittons, jusqu'à la prochaine !