08-03-2021
Mont Blanc
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AD
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Déjà la veille, en analysant les topos et la carte, les esprits s'échauffent, mais Emeric nous répète "je ne suis pas inquiet". Ludo répond hilare « ça me rassure pas du tout mais on y va quand même ! »

6h, réveil matinal et nous prenons la route pour se rendre à la Frasse (les contamines), objectif pointe de Chaborgne. Nous voilà grimpant dans un sous-bois chantant et bucolique, l'atmosphère est envoutante. Peu à peu le foret s'éclaircit et laisse apparaitre des couloirs enneigés bordés par des arrêtes et des barres rocheuses. 
Une petite pause s'impose lorsque Ludo recommence à saigner du nez. On lui avait pourtant dit qu'il ne servait à rien de sniffer de la puff pour tenter de rattraper Anael lancé au rythme d'un colants-pipette. Pendant cette petite pause, Emeric aurait vu une paire de fesse, probablement le mal des montagnes qui s'installe...

La montée va bien, la pente est soutenue et régulière et nous permet d'avancer sereinement. L'aiguille de l'Armancette nous a laissé des coulées à traverser, un beau dégueuli de blocs de glace comme on les aime! Il est temps de mettre les couteaux.
A l'entrée dans le cirque, peu à peu, les lignes des couloirs se précisent, 2 options s'offrent à nous:
- un couloir avec 450m à 40 °, quelques passages à 45°, "large" (selon Vivian Bruchez) et surtout 2 ou 3 petites barres rocheuses à contourner au milieu, coté 4,2 E2.
- un autre couloir bien plus accueillant, 400m  à 38°, coté 4,1 E1, un peu de difficultés tout de même !

Nous gravissons les premiers mètres du couloir difficile puis nous nous apercevons que personne n'est suffisamment fou pour suivre Emeric dans cette ascension. Le reste du groupe le laisse donc faire sa petite promenade de santé et s'oriente vers l'autre couloir. 
Déjà, une première difficulté s'installe, il faut déchausser, enlever les couteaux, dépeauter, serrer les chaussures et rechausser... tout ça dans une pente à 35° au moins, une neige plutôt gelée, avec déjà plus de 1000m de D+ dans les pattes, à jouer les équilibristes pour enlever la neige sous les chaussures... Je rêve à ce moment-là d'être sur le parvis des pistes de ski et voir arriver un beau moniteur me secourir dans ce moment de détresse. Alors que j'étais sur le point de vider mes surrénales, je vois arriver Chewbacca solide sur ses 2 skis, il s'approche de moi et m'aide à effectuer les dernières manips. Je me pince un coup, non non ceci n'est pas un rêve...

A nouveau bien vissée sur mes skis, la pression redescend et le groupe suit Chewbacca vers l'entrée de l'autre couloir. Quelques virages dans une petite couche de neige suave et les sourires se dessinent à nouveau sur les visages de la troupe. 

Même si le sandwich reste bien au fond du sac, on casse un peu la croute, on s'hydrate et on remet les peaux et couteaux avant de s'attaquer à notre ascension. Quelques nuages commencent à s'installer, et d'en bas, on ne voit plus la fin du couloir. On rattrape la trace déjà faite par un groupe précédent, on enchaine les conversions, progressivement mais surement on grimpe ce long couloir. Malgré les couteaux, les pas sont de plus en plus difficiles et épuisants, les skis se dérobent sur la neige. Vous avez déjà essayer de monter sur un tapis roulant qui descend? Rapidement, on met les skis sur le sac et on chausse les crampons! C'est une première pour une bonne partie de la troupe. Comme des manchots faisant leurs premiers pas sur la banquise, on gravit prudemment nos premières marches avec des crampons. Un pas puis l'autre et progressivement l'allure devient plus fluide. L'ascension me paraît interminable quand soudain, au milieu du brouillard, je vois la silhouette d'Anael se dessiner sur le col. Je suis presque arrivée!! 

L'arrivée se fait la tête dans les nuages et sous la neige, mais le groupe a des étoiles pleins les yeux, fiers d'en être arrivés là. La descente ne fait pas rêver, on ne voit pas où l'on met ses spatules ! Ça vaudra à quelques-un des petites galipettes sans gravité. Un peu plus bas la neige est plus facile, la pente est un plus douce, la visibilité est meilleure, les virages s'enchainent avec beaucoup de plaisir. Des petites coulées de fines billes dévalent la pente sur nos skis et sonnent une petite mélodie comme un bâton de pluie. 

Nous retrouvons Emeric qui nous attend la banane jusqu’aux oreilles, assis sur son sac en bas de notre couloir, il vous contera son histoire.

Quelques galipettes supplémentaires entre les blocs des coulées d’avalanche et un piolet semé qui ne sera pas retrouvé.
Un peu plus bas, je retrouve Ludo avec son bâton cassé. Il l’aurait cassé avec les dents ou Erica lui serait rentré deux dents. Enfin je sais plus, j’ai l’esprit confus… je suis en mode économie d’énergie et subit ce dernier border cross pour rentrer au parking.

Je me laisse bercée par la conduite de Chewbaka et le ronron de sa 206 qui nous conduit tranquillement à notre bercail de luxe.

Erica nous gâte et nous prépare un merveilleux repas italien avec un risotto de courge et un tiramisu. Une petite vidéo de rancho pour se fendre bien la poire mettra fin à cette journée fabuleuse !