05-08-2021
Cerdagne - Capcir - Conflent
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Si un jour vos pas vous mènent aux Angles, à Font-Romeu ou ailleurs dans les Pyrénées-Orientales, l’ascension du Carlit vous tentera probablement. Le plus haut sommet du département (2921 m) est connu pour l’extraordinaire vue qu’il offre sur son chapelet de lacs. Et on passe à côté de ces estanys (en catalan) qui à eux seuls valent le voyage.

En revanche, vous serez peut-être rebuté par l’affluence. La randonnée, bien qu’exigeante, attire un grand nombre de marcheurs de toutes origines. Le conseil départemental a organisé un transport par bus sur les derniers kilomètres. Certes, le dispositif a résolu le problème du stationnement anarchique au pied du barrage des Bouillouses (le point de départ de la voie classique) et de la circulation sur une petite route étroite.

Mais les bus et leur publicité contribuent à la grande fréquentation du site. En haute saison, la densité de population devient franchement gênante sur les sentiers. L’ambiance tourne à la procession. On est partagé entre la joie de constater une démocratisation d’un bel endroit en haute montagne… et l’agacement.

Voici donc le récit d’une autre possibilité.

Depuis son séjour de juillet avec ses potes, J. (13 ans) est motivé. Il veut faire l’ascension du prestigieux Carlit. Pas question d’envisager un autre sommet. Sa frangine (19 ans) est partante.

De mon côté, c’est d’accord à condition de nous lever tôt et d’emprunter un itinéraire bis autant que possible.

Nous démarrons à 7h05 de la station de Font-Romeu, au lieu-dit la Calme (2046 m). La montée de la piste de ski, le long du téléski des Perdrix, n’a aucun intérêt en elle-même mais constitue la voie d’accès la plus rapide : quinze minutes pour un marcheur entraîné. Dès le haut de la piste, on entre dans le domaine du beau : vue imprenable sur le massif et lumière du matin. Nous descendons vers le Pla de Bones Hores. Depuis le ruisseau (1950 m), nous montons à vue vers la Serra de les Llebres (les noms sont en catalan, comme sur la carte IGN).

Nous progressons à vue puis sur le sentier qui nous emmène à l’Estany Sec (plus précisément à son extrémité sud), en laissant l’Estany Negre sur notre droite.

Jusqu’ici, notre itinéraire nous a procuré la tranquillité.

À partir du Valell (ou lac Bailleul), nous nous mêlons — malgré notre départ matinal — à la foule de randonneurs qui parcourent la boucle des lacs avec l’option sommet. Au point coté 2364 m, nous attaquons la montée finale. Les jeunes sont en forme, nous dépassons les autres marcheurs les uns après les autres. Sauf un : cet amateur de trail tout-fluo nous laisse sur place.

La grande sœur de J. prend 4-5 minutes d’avance sur nous.

Le balisage est désormais officiel et évite intelligemment les éboulis. Il faut donc utiliser ses mains dans le ressaut final. C’est facile, amusant et peu exposé. Le niveau justifie tout de même l’écriteau « pour randonneurs avertis » placé au-dessus de l’Estany de Sobirans.

Au sommet, vaste au point d’accueillir confortablement deux douzaines de randonneurs, nous nous octroyons trois bons quarts d’heure de pause repas avec la vue attendue.

Sur la partie délicate, qui exige un peu de désescalade, nous croisons des marcheurs qui ont bien besoin d’encouragements.

Nous bifurquons à droite au premier col, près du point 2640 m. Nous descendons dans la Coma dels Forats, en laissant les lacs en dessous de nous à droite. C’est la partie la plus jolie de la balade. Dégradés de rouge sur les rochers, de bleu dans les lacs. Loin d’être austère, l’ensemble reste néanmoins sauvage. Il suffit de lever les yeux pour admirer des isards.

Des cairns nous emmènent dans la direction souhaitée. Nous longeons le pied du Tossal Colomer vers l’Estany Llat. Je subodore la présence de pierriers malcommodes et insiste donc pour suivre strictement les cairns. J’apprendrai le lendemain, par un fin connaisseur du coin, qu’hors des cairns le terrain est en effet scabreux. Le nom de la combe, « dels Forats », suggère la présence de trous, entrevus sur la carte mais que nous n’approcherons pas.

Nous franchissons un ruisseau et naviguons à vue vers le sud-est, sur des segments de sentier.

Par la Serra de les Llebres, nous gagnons l’Estany de la Pradella. Nous y retrouvons une autre partie de la famille. J. s’entend proposer de rentrer avec eux par un itinéraire descendant jusqu’à un autre parking. « Non merci, je veux faire la grosse montée ». Voilà qui fait plaisir à entendre !

Nous finissons donc sans histoire en montant la piste de ski côté Calme nord et en descendant le long du téléski des Perdrix.

Je reste sous le charme de la combe mystérieuse.