30-09-2023
Mont Blanc
ED
Zian
1

Il y a 6 ans, je lisais Bonatti et je rêvais de montagne. C'est d'ailleurs certainement grâce à ces lectures que j'en suis venu à la pratique de cette activité qui a chamboulé le cours de ma vie. En lisant le chapitre sur la face Est du grand capucin (Montagnes d'une vie), je restais fasciné et je ne m'imaginais pas pouvoir y grimper un jour. Jusqu'à ce dimanche.

Ce dimanche, le créneau météo anormalement chaud (iso 0 à plus de 4000) pour un premier octobre nous fait tilt et on se dit que la saison du calcaire peut bien attendre encore un peu, l'appel du Grand Cap est trop fort !

L'approche par la vallée blanche nous laisse le temps d'une réflexion sur la stratégie d'ascension à adopter pour le lendemain, stratégie de facto complexifiée par de moins longues amplitudes de jour. Alors après avoir installé notre bivouac dans la combe maudite nous optons pour un repérage de l'attaque directe qui mène à la terrasse Bonatti et nous fixons même un de nos deux brins dans les deux longueurs en 6 que nous remonterons de nuit à la micro traxion le lendemain. Gain de temps précieux qui va nous permettre de tout grimper et redescendre avant la nuit.

Une fois de retour au camp, nous passons notre temps à faire de l'eau, manger et lire le topo. Mine de rien, la face est impressionnante et les retours que l'on a de cette voie ne présagent pas une journée facile ?

Avec la pleine lune qui éclaire la tente telle un projecteur, la nuit a été perturbée. À 5h, on a du mal à émerger mais chaque minute est précieuse.
À 6h40, nous sommes à pied d'oeuvre. Le soleil arrive très tôt sur la face et nous rejoins alors que nous prenons pied sur la terrasse Bonatti. Les longueurs s'enchaînent, toutes plus physiques les unes que les autres. On trouve ça dur même quand la cotation sur le papier est raisonnable. Le style déroute, les bras dégustent. Alors on a de petites pensées pour le maestro qui ouvrait ça avec des cordes en chanvre et posait des réchappes dans la tempête. Nous, il fait beau, il fait chaud, on a de belles cordes de 60m et deux rack de friends au cul. Relativisons.
Une fois arrivés au pied du mur de 40m, nous découvrons des rafales de pitons dans quasi toutes les longueurs. Je pense que je n'ai jamais autant tiré aux dégaines de toute ma vie. Tous les moyens sont bons et nous ne libérons alors que très peu de longueurs. Néanmoins, l'ambiance est au rendez-vous avec une raideur incroyable et l'escalade extrêmement belle quand elle n'est pas trop dure :)
Rapide passage en face nord et nous rejoignons le sommet à 18h15. Soit 11h35 d'escalade effective. Ni une, ni deux, on se jette dans les rappels de la voie "L'écho des alpages" et nous atteignons le pied de la face 1h30 plus tard.

Le soir, l'ambiance est festive à la tente. On célèbre cette journée à base de festin de semoule/fromage (Wahou!), tisane et chocolat ; puis rapidement le sommeil nous cueille.

À 5h le réveil sonne encore, nous plions le camp dans un décor lunaire et nous remontons la vallée Blanche, silencieuse et belle. L'aube apparaît et nous offre un spectacle unique : le tacul et ses satellites s'enflamment au contact des premiers rayons du soleil. En arrière plan, le grand Capucin s'élève, toujours aussi impressionnant de par sa raideur mais désormais un peu moins mystique.