13-07-2017
Ecrins
1350
2400
3750
TD
21H

Le projet initial était le Pilier Sud des Ecrins, une course majeure de l'Oisan. A 6H30 du matin, je retrouve Romain au Pré de Mme Carle. Il a dormi au refuge du Pré. Le gardien lui a indiqué que la face sud de la Barre avait été plâtrée deux jours avant : la neige tombait  quand Lyon subissait de gros orages. L'analyse première était que le beau temps sécherait la face, analyse immédiatement pondérée par le gardien: c'est sous estimer l'isoterme redescendu, ce qui laisse craindre du verglas pile-poil à la hauteur des difficultés. Un peu déçus, au vu du temps depuis lequel nous rêvions à cette course, nous décidons de ne pas y aller, de prendre notre temps et de monter malgré tout vers le Glacier Noir, juste pour visualiser la course, avec au final l'idée de rejoindre les copains à la Bérarde et de partir sur une autre course le lendemain (la grande traversée des Ecrins ? La Pierre Alain ?...).

Nous montons : la vue depuis la moraine du Glacier Noir est saisissante. Une cordée de 3 part vers le Pilier Sud. Eux ne semblent pas inquiets des conditions. Nous résistons à la tentation de les suivre. Nous redescendons et passons la journée tranquillement en une agréable promenade Briançonnaise. Au final, nous décidons d'aller faire le Pilier Sud de Barre Noire : une course plus courte, de difficulté équivalente (voire un peu plus dure) et qui semble bien en conditions. Nous remontons le soir aux Balmes de François Blanc, la météo n'est pas engageante en apparence (la Barre est restée dans les nuages toute la journée et le vent souffle fort), mais nous savons que le lendemain sera beau.

Départ à 4H de notre bivouac. Il faut monter 600m de dénivelé de terrain pourri pour accéder à l'attaque. En réalité, nous montons un peu plus et nous attaquons trop à droite. Nous nous en rendons compte un peu plus tard, mais il est possible de rejoindre le fil du pilier. La voie fait 650 m de longueur. Le niveau évolue entre le III et le V+ / 6a. Sur la première partie, nous passons l'un ou l'autre en tête, je ressens les premières complications sur des dalles en IV / IV+ pas toujours protégeables. Je me suis épuisé très rapidement. Romain a bien tenu le coup et a assumé la tête sur la plupart de la course : si j'ai pu prendre la tête parfois, c'est lui qui a majoritairemenet tenu le coup en tête et qui a sorti les passages clés. Ceux-ci ne sont pas faciles.

3 passages clés :
- la faille donnée en IV+ sur le topo C2C et qui est "malaisée avec un sac" est vraiment dure (au delà du IV) mais effectivement "facilement protégeable"
- le passage en V+ / 6a est effectivement équipé de 3 pitons bien placés et fort bienvenus. Romain est passé en tête et en grosses... il est remarquable. Nous avions amenés les chaussons, ne les avons pas sortis. Peut être aurais-je dû pour cette longueur.
- vers la fin de la course, après le relais de 3 spits (suffisamment rare pour être identifié), il y a un passage en dièdre déversant. La aussi, il y a des pitons qui protègent. Apparemment, il est possible d'éviter ce passage en passant plus à gauche : il y a deux sorties alternatives et nous ne savons pas clairement celle que nous avons prise. Apparemment, nous sommes plutôt montés dans la version 5/6a que dans la version en IV.

Le rocher est pourri sur le premier tiers, moyen sur le second et meilleur sur le dernier tiers où il devient compact, avec une belle et fascinante coloration rouge.

La course est très belle, nous étions un peu trop au delà de notre niveau pour pleinement l'apprécier, mais on finit très proche de la Barre des Ecrins, sur laquelle on a une vue merveilleuse. Le fil de l'arête entre Glacier Blanc et Glacier Noir donne un point de vue époustonflant.

Niveau condition et préparation :
- nous avons mis 21 H pour revenir jusqu'au Pré, quand le topo C2C donne environ 18H. Rien d'infamant : c'est faisable. Le retour oblige à passer sous les séracs du Dôme et à louvoyer seul entre les crevasses à des heures un peu tardives. A noter que nous avons trouvé le Glacier Blanc très ouvert sur sa fin.
- notre erreur à l'attaque nous a fait perdre le fil du topo. Une bonne partie de la course, nous nous pensions bien plus bas que nous ne l'étions réellement. Ce qui a engendré un réel stress et une certaine fatigue mentale, mais aussi une grande joie lorsque nous nous sommes découverts bien plus avancé qu'escompté.


- les efforts à consentir sont très importants : personnellement je me suis rapidement trouvé très séché et claqué. Romain a tenu la course sur ses épaules.
- l'itinéraire se trouve avec le topo C2C, le Cambon n'est absolument pas suffisant.
- une fois au sommet du pilier Sud, on suit l'arête en direction de de l'ouest jusqu'au sommet de Barre Noire, on trouve facilement les relais de descente qui ramènent à l'épaule entre la Barre des Ecrins et Barre Noire. Je ne cherche pas de nouvel adjectif pour la vue depuis le sommet de Barre Noire... j'ai déjà épuisé "saisisante", "merveilleux", "époustouflant" et quelques autres. Disons "encore mieux" :-).

Le lendemain, nous sommes remontés aux bivouacs des Blames pour récupérer nos duvets et le réchaud. Nous avons rencontré un ancien et son neveu. L'ancien vit aux Vigneaux et a beaucoup pratiqué. Il nous a parlé du Pilier Sud des Ecrins, des Ailefroides... Une masse d'expériences considérable...

Au retour, c'est une très belle expérience. Un peu trop au delà de mon niveau, mais vraiment belle !