31-08-2023
Ecrins
PD
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L’éboulement dans le vallon de Celse Nière et la météo hivernale du début de semaine nous obligent, Jérémie et moi, à abandonner notre projet itinérant autour des Bœufs Rouges et à chercher une alternative pour la fin de semaine. Inspiré par un cr de Patrice (https://www.legaul.fr/alpinisme/cr-alpi/2815-traversee-de-l-aiguille-trifide-21-08-2021-2815) Jérémie propose un we en partant de La Grave pour faire la Pointe Trifide et le lendemain le Rateau Ouest.

J1

Départ 6h30 de Lyon, arrivée en haut du téléphérique de La Grave vers 10h. Il n’est pas tôt mais la course en rocher envisagée n’est pas très longue. C’est l’arête qui est sur la gauche lorsqu’on arrive à la gare des Ruillans.

Le topo annonce une course relativement courte : approche 30 min, 3h sur l’arête, descente 20min.

Pas de suspense inutile, notre temps : approche 1h30, 5h sur l’arête, descente 2h…

Sur l’approche pourtant il ne nous a pas semblé avoir trainé : on a suivi la trace faite par une cordée avec guide qui nous précédait de peu, louvoyant entre quelques crevasses. Arrivés à l’attaque on se lance dans une première partie bien verticale qui passe sans problème : quelques points sont présents, le rocher est bon, RAS. Mais arrivé au relais, je commence à me sentir mal. L’altitude a fini le boulot entamé par un léger état grippal au départ. Je me sens nauséeux, très vite essoufflé, et le pied flageolant.

Jérémie fera la quasi-totalité de la suite en tête. L’arête se poursuit sur une longue portion légèrement descendante. Les pas les plus durs (IV) sont en désescalade et il n’est pas toujours évident de trouver le cheminement le plus facile, même si la progression se fait globalement sur le fil. Une mauvaise gestion de la corde dans cet itinéraire en dent de scie et un placement hésitant et pas toujours optimisé des points occasionnent beaucoup de tirage, et nous obligent à interrompre fréquemment notre progression en corde tendue. De la neige tombée en début de semaine rend certains passages plus délicats mais pas infranchissables grâce à de bonnes prises de main.

Le crux de la voie est un pas de désescalade légèrement déversant, sans prises de main évidentes et sans visibilité pour les pieds. Nous préférons le passer l’un en moulinette et l’autre en rappel (spit + piton).

La lassitude commence à se faire sentir, mais le ressaut final est vite gravi et le sommet atteint à 17h. Notre objectif de rentrer à la gare des Ruillans avant la fermeture de 16h30 pour faire le plein d’eau est enterré. On entame la descente, l’itinéraire est évident mais une neige molle et profonde rend notre progression lente et prudente. Retour au point de départ peu avant le coucher du soleil. On récupère de l’eau qui coule du toit pour le dîner et on s’installe dans un coin pour la nuit.

En résumé les conditions et notre manque d’expérience nous auront bien mis dedans pour l’horaire, mais nous ne pouvons que faire les éloges de cette course : l’arête est très aérienne et effilée, le cadre bien évidemment splendide, le rocher très bon dans l’ensemble. À conseiller. Il semble néanmoins prudent de prévoir un peu plus que les 4h du topo, même pour des cordées plus aguerries.

J2

La nuit sur la terrasse en bois du restaurant est agréable, il n’y a quasiment pas de vent.

Notre performance de la veille nous amène à considérer une course plus abordable que le Râteau : le Pic de la Grave. Un coup de fil au bureau des guides les jours précédents nous avait rassuré sur sa praticabilité.

Notre plan est d’attendre l’ouverture de la gare et du restaurant pour refaire le plein d’eau. Mais il n’y a que des toilettes sèches dans la gare et l’ouverture du restaurant semble lointaine donc on se dit qu’on ne va pas rester là plus longtemps, et qu’on fera avec les 50cl pour cette course relativement courte et matinale.

Départ aux environs de 8h, de nouveau sur le glacier de la Girose on progresse en suivant de bonnes traces. On contourne d’énormes crevasses béantes, on en enjambe d’autres plus modestes, jusqu’à parvenir à la rimaye, en rive gauche de l’entonnoir menant au pic. La trace que nous suivions s’arrête ici. La seule possibilité de franchissement que nous voyions consisterait à traverser un petit pont de neige puis à gravir une petite pente raide en glace. Nous envisageons un instant de nous y aventurer, en tirant une longueur et en posant des broches dans le passage raide. Mais notre absence d’expérience dans ce genre de manœuvre, ainsi que la perspective de la descente quelques heures plus tard finissent par emporter la décision du côté de la prudence. Nous irons bien prospecter un autre passage en rive droite, où la rimaye semble bouchée, mais il est déjà 10h et il ne paraît pas très sage de s’acharner… La décision est difficile à prendre, mais finalement nous faisons demi-tour vers la gare. Après une petite balade exploratoire sur le glacier en lot de consolation et un casse-croute frugal où nous écluserons nos derniers centilitres, nous reprenons le téléphérique vers 13h.

Malgré nos déconvenues, c’était une belle aventure, dans un environnement incroyable (si l’on oublie les fatras de câbles et de pylônes à moitié rouillés… et ceux qui nous ont permis de monter !), et surtout riche en enseignements. La difficulté de ce type de course dépend beaucoup des conditions : il faut savoir nuancer les informations des topos en fonction de la saison, de la météo, de l’enneigement, etc. Le samedi, nous avons perdu beaucoup de temps à nous demander si nous devions tenter le franchissement de la rimaye, et comment… jusqu’à ce qu’il soit de toute façon trop tard pour s’y engager.

C’est dommage pour le Pic de la Grave, ce sera pour une prochaine fois (en début de saison). Mais le bivouac à 3200m, face au glacier et à la Meije, était très cool !