16-09-2023
Vercors
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Quand on se promène sur le Gerbier, on ne peut qu'éprouver un certain désir pour ce calcaire au grain prononcé et aux lignes racées. Et puis quand on cherche des topos de voies plus grimpantes que la classique traversée, on prend vite peur face à l'ampleur de chantiers dans la face Est. Alors forcément, quand au hasard de flâneries sur C2C je découvre des itinéraires abordables dans la face ouest, ça rejoint immédiatement la fameuse "pile à projets". Ceux-là sont de faible ampleur, ça devrait se faire facilement. Mais c'est sous estimer l'orientation plein ouest de type "plein cagnard", qui rendra cet itinéraire inabordable tout l'été. C'est finalement au hasard d'une journée de septembre qu'on part explorer ces lignes.

L'approche est une petite mission, comme on les apprécie. Train de Lyon à Grenoble, où on saute dans un bus Transisère pour Villard de Lans. Ces bus sont équipés de portes vélos, permettant d'embarquer jusqu'à 6 destriers, alors on aurait tort de se priver. Il faut dire que le bus s'arrête au cœur de Villard de Lans, pour rejoindre le parking il reste encore quelques kilomètres et surtout 200m de D+ en lacets dans un sous bois. Je suis en vélo "classique", là où Aurélien a eu l'intelligence de doter sa monture d'un petit moteur. C'est donc tout naturellement que je lui confie mes sacoches. 
 
Du parking, on est en terrain connu, on remonte combes et sous bois jusqu'à l'attaque des arêtes, puis le très joli sentier en balcon qui rejoint l'itinéraire de descente du Gerbier. C'est que notre voie se déroule un centaine de mètres sur le côté des rappels. Arrivé là, la journée a déjà commencé depuis bien longtemps pour nous. Un petit grignoti au milieu des bouquetins, et voilà qu'on s'équipe pour passer au plat de résistance. 
 
Aurélien tente de jouer la carte de la naïveté pour nous envoyer dans "Les rois de la touffe", mais je reste intransigeant quant à notre destination : ce sera "allez les bœufs" qui commence par deux longueurs en 6a que les différents CR annoncent fort jolies ! La première longueur offre rapidement un pas de bloc, mais avec un peu de lecture pour repérer les bacs salvateurs, et moyennant un peu de bourrage au biscottos, ça passe très bien. Le reste est une promenade tranquille dans une dalle. L2 est sur le même schéma, une longueur assez gentille au milieu de laquelle se cache un pas un peu plus velu. Un cran au-dessus de L1. L3 est un 5a tout mignon. De là, il est possible de rejoindre les 2 dernières longueurs des rois de la touffe, mais face à la beauté des cannelures qui nous surplombent, on choisit l'option "Sapesque" et continuons dans la dernière longueur, en 5b. Qui remplit toutes ses promesses, cannelure franche et ludique sur un rocher irréprochable. Et nous voici, déjà, au sommet. On enchaîne sur la toute fin des arêtes du Gerbier, qui permettent tout de même de se faire happer par le gaz de la face Est. Gaz que la face Ouest nous aura épargné, on était plutôt dans l'ambiance "plaisir" que "survie". 
 
Au pied des rappels, on attaque le retour. Marche jusqu'aux vélos, puis une descente tout schuss jusqu'à Grenoble. Dans ce sens, on ne regrette pas de pédaler ! On arrive à Grenoble à 20h, pile à temps pour notre train.
 
Il faut reconnaître que du point de vue du ratio "approche/grimpe", cette sortie est très médiocre. Il aurait été plus pertinent de dormir sur place pour passer deux jours (et enchaîner ainsi 3 voire 4 voies sur le weekend !), ou squatter la veille chez un des nombreux transfuges Gaulois installés à Grenoble, afin de pouvoir prendre un bus 2h plus tôt et ainsi enchaîner sur Les Rois de la touffe. Mais la mobilité douce à la journée, c'est un challenge, et c'est à qu'on aime. ça transforme une banale journée de grimpe en journée multisport complète. Et puis c'est une sensation bien connue des alpinistes, skieurs et montagnards : c'est le parcours qui mène au sommet qui y rend la vue magnifique. Et ce jour-là, on a trouvé que la vue depuis le sommet du Gerbier était absolument incroyable !