04-06-2019
Couserans - Catalogne Ouest
1700
2618
PD
1

Cap de Rulhos, en boucle, variante de montée par un couloir sans nom, arête E, et descente à la con 

#simameremevoyait

Avec tout ce sommeil, le temps de prendre un petit déj au soleil et la route par les cols, il est plus de 11h quand j'enfile godillots et sac à dos et me mets enfin en route. Le panneau du GR annonce la cabane de Marterat en 4h30, mais ça c'est la durée pour les familles, je suis tout seul, c'est large. La montagne coule de toutes parts. A tel point qu'au franchissement du torrent, la passerelle amovible est noyée. Qu'à cela ne tienne, quelques sauts de cabris de rocher en rocher et me voilà passé. Montées et plats se succèdent et on retrouve les névés. Difficile de repérer exactement la trace dans ces conditions, m'enfin ça avance efficacement et puis l'objectif s'adaptera. Une traversée en écharpe entre deux barres qui ne m'inspire pas ... je préfère continuer tout droit et j'atteins la crête frontalière par un petit couloir sans nom. 
Me voici sur un sommet sans plus de nom qui domine assez largement le port de Marterat à l'ouest (passage vers mon but tacite du jour, le pic du même nom ou son voisin espagnol). Il fait encore grand beau. La vue est plaisante sur les lacs espagnols au sud et les vallons sauvages d'où j'arrive. Je ne vais quand-même pas redescendre pour remonter ! Un coup d'œil à la carte : le cap de Rulhos, sur la crête à l'ouest fera bien l'affaire. Et si tout va bien, il y aura un chemin pour descendre. Entre nous deux, un tronçon d'arête assez effilé avec quelques ressauts. Normalement, ça devrait passer. Et ça passe. Et c'est joli. Peut-être un ou deux pas de désescalade en 4, le reste est balisé par les isards. Puis la crête s'élargit jusqu'au sommet débonnaire du cap de Rulhos et son cairn. Le Valier vu de profil et la Maladeta et l'Aneto en arrière-plan me remercient d'être monté - franchement, les gars, y a pas de quoi, c'est moi qui vous suis reconnaissant ! Pour la descente, ça tombe bien, il y a une trace cairnée. Piolet en main (histoire de dire que je ne l'ai pas trimbalé pour des nuts), je franchis les 10 m de névé sous le sommet . 

Voilà, voilà, le petit col, comme sur la carte. Apparemment, il doit y avoir une trace à flanc pour basculer dans l'autre vallon vers une cabane et je trouverai un sentier. Ah tiens, non. Ce n'est pas un passage. Bon, tant pis, et va pour le creux, encore plein de neige, ça file vers le bas. A ce train, dans une heure et demie, je suis à la bagnole. Je passe une cabane de berger qui domine une "perte", phénomène toujours assez curieux à observer, même si ce n'est pas le trou du Toro. Les oueilles c'est pas pareil mais le berger, faut bien qu'il monte par quelque chemin. Je poursuis une vague trace. Qui finit par s'effacer carrément au niveau d'une prairie surplombant un réseau d'éperons. Là, ça pue mais je continue. Direction la forêt. Toujours un choix hasardeux quand on ne sait pas où on va ... Ça ne loupe pas : après 20 minutes de patinage au jugé, danse avec les hêtres, je dois bien me faire une raison, ça ne va pas passer. Il faut dire que les barres rocheuses dans mon dos et la cascade qui déboule en contrebas sont assez convaincantes. Comme un con ! Y a plus qu'à remonter, dans le même micmac. 

* Ici, l'auteur censure un épisode de progression des plus scabreux, comme les propos afférents.*

Me revoici de nouveau perché sur les éperons mais à court de destrier. Si je pouvais rejoindre au plus direct le petit torrent que voilà, au moins je verrais où je mets les pieds. Ca se passe par un petit couloir raide mais propre. Et me revoici au niveau du torrent. Ouf ! J'ai bien dû perdre une heure avec ces âneries. 

Las ! Le torrent franchi de manière acrobatique à l'aller a encore grossi. Un courant, un tumulte, mes aïeux ! Ça ne passera jamais. Première tentative, pieds nus, balayette, glissade. Blouf. Mais quel con mais quel con ! Je remonte, à la recherche d'un franchissement plus calme. Foin ! Le pont de neige du névé a cédé, c'est fichu de ce côté... Ma dernière chance : un gros caillou, à peu près accessible à 2,50 m du bord et auquel je pourrais m'agripper. Après ça semble plus calme. Je rechausse, je ne peux pas me mouiller plus et ce sera plus stable. Traaanquillement, làaa, ça tient, ça tient... Avec de l'eau jusqu'à la ceinture, la pression du courant me fauche mais j'ai réussi à attraper le fameux caillou. Un rétablissement tout sauf gracieux et le reste n'est que pitrouillage et histoire de ronces.

Bon ben, me dis-je entre deux geysers de chaussures, note pour la prochaine fois : si le torrent ne semble pas passer à midi, faire demi-tour.

Change intégral à la voiture, de fringues comme de météo, sur les coups de 19h20. 'M'aura bien occupé c'tte affaire. Avec ces histoires, je vais rater l'apéro. Temps d'orage.