02-07-2023
Ecrins
1700
3700
D
15
1

 

 

 

Prenez le Pilier NE des Bans ; actuellement en bonnes conditions, il m’appelle et je ne peux qu’aller à sa rencontre. Je le connais depuis quelques années déjà, et cet esthétique pilier des Ecrins me parait une bonne option pour ce week end. Même s’il n’est pas recommandé par tous, ses quelques point négatifs (il est assez sauvage, et de moins en moins facile d’approche au fur et à mesure des années) sont compensés par une solidité appréciable, une présence envoutante et un grain qui donne envie de poser les mains dessus. En plus, il va me permettre de bivouaquer, un de mes grands plaisirs en montagne. J’espère être à la hauteur…

Prenez Aurélien ; actuellement en bonne condition, il m’appelle et je ne peux qu’aller à sa rencontre. Je le connais depuis quelques années déjà, et cet esthétique pilier du GAUL me parait une bonne option pour ce week end. Même s’il n’est pas recommandé par tous, ses quelques point négatifs (il est assez sauvage, et de moins en moins facile d’approche au fur et à mesure des années) sont compensés par une solidité appréciable, une présence envoutante et un grain qui… Heu enfin, il est sympa quoi ! En plus, il va me permettre de bivouaquer, un de mes grands plaisirs en montagne. J’espère être à la hauteur…

Nous partons donc de la Bérarde en ce dimanche après-midi (en voiture ; la navette entre en service le 8 juillet, avis aux amateurs). L’homme en forme donne le rythme, et nous allons d’un bon pas vers le refuge de la Pilatte, assez peu recommandable depuis quelques années en raison de vélléités inexpliquées de jonction avec le torrent 150m plus bas. Une cordée revenant des Bans nous rassure sur l’état du Glacier, qui les dernières années peut s’avérer LE gros morceau de la course, plus que le pilier. Désormais confiants, nous nous installons dans un des nombreux spots de bivouac au dessus de la plateforme du refuge, et dégustons nos quiches  en regardant les Bans jouer à cache-cache avec le brouillard.

A 3h, le réveil sonne, et nous partons sous un ciel limpide descendre les échelles qui mènent au Glacier de la Pilatte. Nous remontons ce dernier par un cheminement assez évident, qui ne nous causera finalement pas de frayeur. Aurélien y va bien de sa jambe droite à travers un pont de neige, histoire d’avoir quelques histoires à raconter, mais globalement le bon regel et la quantité de neige honorable pour un début juillet nous amène à la base du pilier certes un peu tard, mais sans stress.

Le vilain glacier derrière nous, nous attaquons avec le soleil une escalade qui sera une très bonne surprise dans ce massif si injustement critiqué. Sans vouloir faire mon Romain, je ne peux qu’ajouter cette ascension à la liste des voies en Oisans qui proposent une grimpe intéressante sur un rocher agréable et sain. Vraiment, les difficultés sont en plus assez homogènes dans le III+/IV  et ne dépassent pas le IV+. Nous débouchons donc ravis sur le sommet N des Bans, duquel nous voyons nos 4 voisins de bivouac finir leur pique-nique sur le sommet S ; parfait, la descente du glacier sera tracée/“testée“.

La traversée vers le sommet S me semblera moins ludique, peut-être parce qu’elle est du genre à prendre 1h pour 3 gendarmes et demi, peut-être aussi parce que nous commençons à sentir la chaleur, et imaginons que le glacier aussi. Quoi qu’il en soit, malgré un rappel coincé, nous débouchons au sommet S peu avant les douze coups de midi et le spectacle est au rendez vous ; la situation singulière de ce sommet à la frontière de la partie méridionale des Ecrins nous offre un point de vue inhabituel sur le Devoluy et le Champsaur, mais aussi sur les géants de la partie N du massif, sur fond de mer de nuage en haut Vénéon. Le ciel est bleu, les oiseaux chantent.

La descente est nettement moins paumatoire que ce que l’on peut lire ça et là ; l’itinéraire est très logique et tout s’enchaine d’une manière fluide, à défaut d’être rapide. Nous comprenons que Gilbert Montagnié est actif sur l’édition des topos camptocamp lorsque nos “yeux perçants“, pour citer, se posent sur les sangles fluos 20m en contrebas du sommet qui annoncent la série de rappels. Du même coup nous comprenons pourquoi le topo de la montée emmène gravir une dalle en V alors que le fil en excellent rocher ne dépasse pas le IV+.

Grisés par la découverte de notre nouveau pouvoir, nous reprenons pied sur le glacier, chaussons les crampons, et filons à travers rimaye et crevasses que nous détectons parfois jusqu’à 30m à l’avance ! En bas du glacier, conscients de notre avantage, nous rendons hommage à ce sacré Gilbert qui a du bien galérer dans certaines parties du glacier. Malgré un ou deux passages raides en glace vive qui auraient pu être évités, nous sommes tout de même heureux d’avoir pu suivre sans trop réfléchir les traces de nos compagnons du jour, que nous voyons se diriger vers les échelles alors que nous nous décordons en bas du glacier.

La suite ne sera pas la partie la plus agréable de la journée, entre les échelles à remonter, les sacs à refaire, et la descente interminable qui amène Aurélien à douter de son programme alpin (consistant à cocher toutes les classiques des Alpes dans l’été). Reste qu’après un effort de quinze bonne heures, le bougre attrapera son train à Grenoble à la minute près, en courant comme un dératé à travers le parvis de la gare ! La vie est décidément bien faite.

Merci Aurélien pour ce bivouac sans renard, cette voie sans serpent, ce sommet sans tracas et cette descente sans orage ; c’est un beau morceau des Ecrins derrière nous, et je le recommande chaudement si le glacier est en conditions !